Frank MULLER:

Images polémiques, images dissidentes.
Art et Réforme à Strasbourg
(1520 - vers 1550).

2017. 368 pages, 126 illustrations.
ISBN 978-3-87320-366-2

Studien zur deutschen Kunstgeschichte 366

Pour la première fois sans doute, cet ouvrage explore de manière documentée les images polémiques de Strasbourg, une des villes-phares des premières décennies de la Réforme dans l'espace germanique, en les analysant de façon pluridisciplinaire dans le contexte historique et théologique de l'époque. Si, comme dans les autres grands centres d'imprimerie (Augsbourg, Bâle, Nuremberg et naturellement Wittenberg), les oeuvres de Luther y sont éditées dès 1518, la propagande par l'image se met en place à partir de 1520. Outre un certain nombre de portraits de Luther, ce sont principalement les clercs et surtout le pape qui sont attaqués. On note aussi l'apparition du prototype de l'«homme du commun» défenseur des idées nouvelles, Karsthans, qui sera souvent repris jusqu'en 1525.
Les gravures d'illustration prennent la relève d'un tout autre genre d'« images », les peintures et les sculptures de l'espace ecclésial, qui furent la cible des iconoclastes en tant qu'objets d'adoration. La «purification» des églises se poursuivit à strasbourg entre 1524 et 1529, avec des poussées violentes, suivies d'accalmies. Quelques gravures témoignent de façon symbolique de ces événements, sous la forme d'illustrations de certains épisodes de destruction d'idoles de l'ancien Testament.
Plus généralement, les caractéristiques de la réforme strasbourgeoise sont particulières à beaucoup d'égards, d'abord parce que presque tous les imprimeurs passent très rapidement du côté des idées nouvelles et produisent de nombreux écrits polémiques illustrés, d'autant que les trois artistes principaux, Hans Baldung Grien, Heinrich Vogtherr l'ancien et Hans Weiditz témoignent d'une remarquable imagination pour attaquer l'Eglise romaine et ses défenseurs, même dans le cadre d'illustrations bibliques, qui sont parmi les plus originales de l'époque, mais aussi pour visualiser les nouvelles idées-phares. L'intéressant est que ces artistes ne sont nullement les porteurs de la réforme «officielle», contrairement à Cranach à Wittenberg.
Baldung n'est pratiquement plus intervenu dans ce domaine et les deux derniers cités étaient proches des idées de la réforme radicale, comme d'ailleurs plusieurs imprimeurs ; ceci a donné lieu à un phénomène unique dans l'espace germanophone et qui constitue le noyau central de l'analyse : la production d'images «dissidentes» destinées à propager ces idées, sachant que dans les années 1526-1532, une partie non négligeable de la population strasbourgeoise sympathisait avec les conceptions anabaptistes-spiritualistes. C'est certainement l'utilisation du motif visuel du Tétragramme (les quatre lettres du nom de Dieu en hébreu) pour remplacer la représentation anthropomorphique de Dieu qui constitue la nouveauté principale, témoignant ainsi d'idées antitrinitaires précoces. La lecture de ce livre rend ainsi sensible la complexité des relations entre l'écrit et l'image, et plus généralement, entre les acteurs – réformateurs «officiels» et dissidents – d'une contestation qui se fait jour et se diversifie dans les premiers temps d'une réforme urbaine multiforme.

Zum ersten Mal dokumentiert dieses Buch eine interdisziplinäre Übersicht über die in Straßburg veröffentlichten polemischen Bilder aus der ersten Zeit der Reformation in einem geschichtlichen und theologischen Kontext dieser Zeit. Wie in den anderen grossen Druckorten (Augsburg, Basel, Nürnberg und natürlich Wittenberg) wurden Luthers Werke schon früh verlegt und die Bildpropaganda beginnt im Jahr 1520. Neben etlichen Porträts von Martin Luther sind die meisten Bilder gegen Kleriker, insbesondere den Papst gerichtet. Besonders interessant ist hier auch die Figur des Karsthans, eines Prototyps des "gemeinen Mannes", der die neuen Ideen verteidigt.
Diese Holzschnitte ersetzen Bilder einer anderen Art: sie stehen anstelle der Gemälde und Skulpturen im kirchlichen Raum, der Zielscheibe der Ikonoklasten, die sie als Götzendienst bezeichneten. Diese "Reinigung" der Kirchen hat sich in Straßburg von 1524 bis 1529 in unterschiedlichen Phasen fortgesetzt. Einige Holzschnitte alttestamentarischer Geschichten von Götzenzerstörung sind symbolische Zeugnisse dieses Prozesses. Die Straßburger Reformation ist in mehrerlei Hinsicht außerordentlich: nahezu sämtliche Drucker haben sich sehr schnell auf die neuen Ideen eingestellt und zahlreiche illustrierte polemische Schriften herausgebracht. Die drei Hauptkünstler, Hans Baldung Grien, Heinrich Vogtherr der Ältere und Hans Weiditz erwiesen sich als hochbegabte Satiriker gegen die römisch-katholische Kirche und ihre Glieder, insbesondere in sehr originellen Bibelillustrationen, aber sie wussten auch wie man die neuen Leitgedanken darstellen konnte. Interessanterweise sind diese Künstler unabhängig von der "offiziellen" Reformation, ganz im Gegensatz zu Cranach in Wittenberg.
Baldung hat sich bald mit anderen Dingen befasst und die beiden anderen, und mit ihnen auch mehrere Drucker, sympathisierten mit den Auffassungen der radikalen Reformation – so wie auch zahlreiche Bewohner Straßburgs. So hat sich die Hauptanalyse einem im deutschsprachigen Raum einzigartigen Phänomen gewidmet: der Produktion von "Dissidenten"-Bildern, die täuferisch-spiritualistische Begriffe verbreiten sollten. In dieser Beziehung ist die wichtigste Neuerung die Darstellung des Tetragramms, also der vier hebräischen Buchstaben des Namens Gottes, das die anthropomorphe Gestaltung Gottes ersetzt – was auch von frühen antitrinitarischen Gedanken in Straßburg zeugt. So veranschaulicht dieses Buch die Vielseitigkeit des Verhältnisses zwischen Text und Bild, und allgemeiner: zwischen den Darstellern – "offizielle" Reformatoren und Dissidenten – der Anfechtung der "alten Kirche" in den ersten Jahrzehnten einer vielförmigen Stadtreformation.

»Aufgrund der gelungenen Synthese aus historischer, theologischer und kunsthistorischer Betrachtungsweise auf Basis jahrelanger intensiver Quellenforschung und Literaturkenntnis legt Frank Muller mit dem vorliegenden Werk ein erhellendes Kompendium für die reformatorische Straßburger Bildproduktion vor.«
Alexandra C. Axtmann in Zeitschrift für die Geschichte des Oberrheins Band 168 (Neue Folge 2020) Seiten 661-663.

»Cet ouvrage n'est pas seulement le livre d'un historien d'art ; c'est la somme d'un historien et d'un théologien, attentif tant aux questions politiques et au rôle du Magistrat qu'à la théologie des Réformateurs strasbourgeoises et à leur projet ecclésial contrecarré par les dissidents.«
Matthieu Arnold in Revue d'Histoire et de Philosophie Religieuses, 101e année n° 3, 2021

»Though there have been many previous studies of the woodcut in the Reformation this is the first to focus specifically and at length on the way in which woodcuts were used in printed material published in Strasbourg. Muller begins by sketching the early use of woodcut in the city for propagandistic purposes, concentrating on Hans Baldung Grien and his images of Ulrich von Hutten and Martin Luther. Next he examines Strasbourg iconoclasm, local printers, and the 'subversive' artists Hans Weiditz and Heinrich Vogtherr the Elder. Chapter 3 deals with the tetragram YHWH, which throws valuable light on the influence of Judaism at Strasbourg, and chapter 4 with the visionary Strasbourg 'prophets' such as Lienhart and Ursula Jost. Chapters 5 and 6 are of particular interest, devoted as they are to the illustrations in the bibles printed by Hans Knobloch, Johann Grüninger, Wolf Köpfel, and Valentin Kobian in the twenties and then those in bibles produced by Wendelin Rihel and Jacob Cammerlander in the twenties and early thirties. Above all, Muller's study serves well to demonstrate the close collaboration between the city's many printers and artists and their sympathies with the non-conformist ideas shaping the religious climate there.«
Neil Harris in The Library, 7.19.4, December 2018.

»L'auteur connaît admirablement bien les artistes strasbourgeois de cette époque, lesquels sont indissociables des éditeurs pour lesquels ils travaillent, tellement l'invention, la réalisation et la diffusion de ces images imprimées, donc multipliables en grand nombre (pratique particulièrement en cohérence avec les idées de la Réforme), sont étroitement liées. [...]
L'étude minutieuse de ces images imprimées - qui disent parfois ce que l'écrit ne peut se permettre d'exprimer (merveilleux pouvoir symbolique et polysémique du langage visuel !), est sous-tendue par de nombreuses observations historiques qui nous permettent de les contextualiser. [...]
On souhaiterait de telles études pour les autres grandes villes de la Réforme marquées par l'iconoclasme (ou au contraire par son rejet comme à Nuremberg).«

Jérôme Cottin dans Études théologiques et religieuses, 1/2019

»La ricerca di Muller costituisce, in definitiva, un interessante contributo sul tema del rapporto fra Riforma e arte, esemplificandone i differenti, possibili sviluppi in una città che rispose alla diffusione delle idee di Lutero con un proprio modo di utilizzare le immagini, non soltanto distruggendole, ma dando vita a raffigurazioni originali e mostrando l'irriducibilità delle iconografie riformate alla sola polemica antiromana.«
Marco Fratini dans Riforma e Movimenti Religiosi, 06/ Dicembre 2019, pp 239-242

Professeur émérite d'Histoire moderne de l'Université de Strasbourg, Frank Muller a déjà publié aux éditions Valentin Koerner sur Jacob Kautz et sur les Artistes dissidents dans l'Allemagne du seizième siècle : Lautensack — Vogtherr — Weiditz, 2001 (Bibliotheca Dissidentium 17 & 21).

Frank Muller, Professor emeritus für neuere Geschichte, lebt in Straßburg. Im Verlag Valentin Koerner veröffentlichte er bisher über Jacob Kautz in der Bibliotheca Dissidentium, sowie den Band Artistes dissidents dans l'Allemagne du seizième siècle: Lautensack — Vogtherr — Weiditz, 2001 (Bibliotheca Dissidentium 17 & 21).

Siehe auch:
Michael A. PEGG: A Catalogue of German Reformation Pamphlets